Article de Dion Mebius paru le 4 mars 2022. Lien vers l’article original

Le Maroc s’y tient : le journaliste d’investigation Omar Radi était un espion employé par l’ambassade des Pays-Bas à Rabat. Jeudi soir, Radi a de nouveau été condamné à six ans de prison en appel.
À côté des charges d’espionnage, Radi est à nouveau reconnu coupable du viol d’une ancienne collègue de travail au média d’information marocain « Le Desk ». Le seul témoin de l’affaire, qui a déclaré que son collègue Radi n’avait rien fait de mal, a été condamné à une peine de prison d’ un ans (avec six mois conditionnels) pour avoir omis de signaler le viol. Avec cette inculpation, son témoignage n’a pu être utilisé par Radi. Au cours des dernières années, une série de journalistes critiques au Maroc ont disparu en prison – pour délits médicaux, viols, agressions sexuelles, relations extraconjugales et avortement. A ce stade, Omar Radi peut encore se pourvoir en cassation.
Espionné
Omar Radi (35 ans) est un journaliste marocain d’investigation renommé, connu dans son pays pour ses révélations sur les intérêts commerciaux du roi Mohammed VI, l’homme le plus riche et le plus puissant du Maroc. En juin 2020, Amnesty International a révélé que le téléphone de Radi avait été piraté par les autorités marocaines. Trois jours plus tard, le journaliste a dû se présenter au poste de police, où il a appris pour la première fois l’accusation d’espionnage pour les Pays-Bas. Il est incarcéré depuis le 29 juillet 2020.
Selon le Maroc, Radi a transmis des informations à l’ambassade des Pays-Bas à Rabat. Il l’aurait fait lors du soulèvement de 2016 et 2017 dans le Rif, dans le nord du pays. Les Pays-Bas auraient alors utilisé les informations pour ternir la réputation du Maroc, avec lequel il entretient des relations très difficiles. Cependant, les preuves de la lourde accusation d’espionnage n’ont pas été présentées lors du procès, qui a été qualifié de farce par les groupes de défense des droits de l’homme. Radi a toujours soutenu que ses contacts avec l’ambassade étaient de nature journalistique.
Appel à l’aide
Il s’est écoulé un an entre l’arrestation de Radi et sa condamnation en première instance. Pendant tout ce temps, le gouvernement néerlandais est resté silencieux, celui-ci dépend en effet de la bonne volonté du Maroc lors du retour des demandeurs d’asile et, selon les critiques, n’a pas osé critiquer. Une lettre des parents de Radi implorant l’aide de l’ambassade pour réfuter l’accusation est restée sans réponse de la part de l’ambassadeur à Rabat, Jeroen Roodenburg.
L’ambassadeur a déclaré plus tard que le courrier n’avait pas erreur pas été traité. Sigrid Kaag, alors encore ministre des Affaires étrangères, a promis à la Chambre des représentants que le personnel de l’ambassade assisterait aux séances publiques dans cette affaire. Après des questions du Volkskrant, le ministère a retiré ces mots : personne n’était allé au tribunal. (Lien de l’article original , Lien de l’article en français)
Insatisfaction
Ce n’est qu’en octobre 2021, trois mois après la condamnation de Radi, que le cabinet néerlandais a rejeté l’accusation d’espionnage. Cependant, cela n’a pas été le cas lors de l’appel, au grand mécontentement des parents de Radi. Ils espéraient une réponse beaucoup plus forte, par exemple de la part de l’ambassade à Rabat. “Les Pays-Bas se mettent en avant en ce qui concerne les droits de l’homme dans le monde entier et aussi en Afrique, mais en fin de compte, les Pays-Bas n’ont jusqu’à présent pas agi à cause du soi-disant intérêt néerlandais”, a écrit la mère Fatiha Cherribi à l’ambassadeur Roodenburg le 27 janvier. “Mon fils doit-il ici payer le prix ?”